Avez-vous déjà entendu parler du nerprun bourdaine? Sauriez-vous le reconnaître? Depuis plusieurs années, cette plante exotique envahissante fait partie des campagnes de sensibilisation, aux côtés d’autres envahisseurs d’importance au Québec, comme la renouée du Japon, la berce du Caucase, le myriophylle à épis et le nerprun cathartique. L’équipe du COBARIC est allée sur le terrain, accompagnée par un employé de l’Agence de mise en valeur des forêts privées des Appalaches (AMVAP).

Notre objectif : mieux comprendre la dynamique de cet arbuste qui représente un danger pour la biodiversité et l’économie en milieux forestier et agricole.

Qu’est-ce qu’une espèce exotique envahissante?

Une espèce exotique envahissante (EEE) est un végétal, un animal ou un micro-organisme qui est introduit hors de son aire de répartition naturelle. Son établissement et sa propagation peuvent constituer une menace pour l’environnement, l’économie ou la société. En effet, certaines espèces peuvent représenter un danger pour la santé humaine, et/ou affecter la biodiversité des milieux naturels.

C’est quoi, le nerprun bourdaine?

Le nerprun bourdaine est un arbuste exotique envahissant originaire d’Eurasie. Pouvant dépasser 10 pieds de haut (plus de 3 m), il pousse d’environ 1 mètre par an, ce qui lui donne un avantage considérable sur les autres espèces qui partagent son milieu. En effet, s’il croît plus vite que les autres, cela signifie qu’il dépense plus d’énergie et de nutriments puisés dans le sol et qu’il n’en laisse pas assez pour que les autres espèces puissent se développer.

Le nerprun bourdaine possède des feuilles alternes, non dentées, luisantes, avec 6 à 10 nervures bien définies de chaque côté de la nervure centrale. Sur les jeunes arbustes, l’écorce est de couleur rougeâtre et présente de petites lignes blanches bien caractéristiques.

  • Feuilles alternes, non dentées, avec 6 à 10 nervures de chaque côté de la nervure centrale.

    Vue de près d'une feuille de nerprun bourdaine
  • Jeune individu ayant poussé sous couvert forestier (feuilles plus larges).

    plant de nerprun bourdaine qui a développé des feuilles plus grandes pour capter la lumière en milieu couvert.
  • Individu mature mesurant plus de 10 pieds (3 m) de haut.

    Vue sur un individu nerprun bourdaine mature mesurant environ 5 mètres de hauteur.
  • Fruits de nerprun bourdaine.

    Fruits de nerprun bourdaine et vue sur la tige rougeâtre avec des traits blancs.
  • La tige est rougeâtre avec des petites lignes blanches.

    les fruits du nerprun bourdaine sont rouges et deviennent noirs à maturité.

Une particularité du nerprun bourdaine est qu’il peut fleurir plusieurs fois par année, entre les mois de mai et juin. Les fleurs produisent ensuite de petits fruits qui deviennent noirs quand ils sont mûrs. Un arbuste peut porter jusqu’à 1800 fruits, qui contiennent chacun 2 à 3 graines! Les risques de propagation de cette plante sont donc très élevés.

Une plante dangereuse pour la biodiversité québécoise

  • Nuisance pour la biodiversité et la croissance des plantes indigènes

    La présence et la propagation rapide du nerprun empêchent la régénération du milieu naturel, car les propriétés de cet arbuste font de celui-ci un grand compétiteur. Pour les propriétaires de boisés, la colonisation des terres par le nerprun nuit au développement des espèces désirés dans les forêts.

  • Diminution de la faune dans les boisés envahis

    Plus le nerprun bourdaine se propage, plus la richesse de nos écosystèmes diminue : il y a moins de nourriture disponible et l’habitat devient hostile pour les mammifères, qui finissent par manger les baies de nerprun. Ces baies sont malheureusement toxiques (non digestes) pour la plupart d’entre eux.

  • Toxique pour certains amphibiens

    Les feuilles de nerprun bourdaine contiennent un composé chimique appelé émodine. Ce composé affecte le développement embryonnaire des amphibiens à métamorphose rapide lorsqu’il entre en contact avec l’eau des mares temporaires. (source)

Le nerprun bourdaine, une menace pour l’économie forestière

Le nerprun bourdaine se plaît dans les milieux forestiers : il va croître tant sous couvert qu’en milieu ouvert. Cet arbuste peut en effet s’épanouir en milieu ombragé, même s’il sera plus vigoureux en pleine lumière. Par ailleurs, moins il y a de lumière disponible, plus le nerprun bourdaine va développer de grandes feuilles et, de manière générale, la présence de cet arbuste diminue fortement la lumière disponible pour les autres espèces d’arbres et de végétaux.

Suite aux coupes forestières, le nerprun va profiter des ouvertures pour s’installer et former des colonies denses, comme on l’observe chez le framboisier par exemple. Cette envahissement va nuire à l’établissement et à la croissance de la régénération des espèces ligneuses commerciales comme le bouleau jaune (Betula alleghaniensis), l’épinette rouge (Picea rubens), l’érable à sucre (Acer saccharum), l’érable rouge (Acer rubrum) ou encore le sapin baumier (Abies balsamea).

  • Un arbuste peut mesurer plus de 10 pieds (3 m) de haut.

    Comparaison entre la hauteur d'un plant de nerprun bourdaine et la taille moyenne d'un humain.
  • Sous couvert forestier, présence faible ou absence de nerprun bourdaine.

    Vue en forêt : la végétation des arbres limite la propagation du nerprun bourdaine au sol.
  • Après une coupe forestière, le nerprun profite de l’espace pour s’y développer

    Après une coupe forestière, le couvert forestier est dégagé et le nerprun bourdaine en profite pour s'y développer densément.

…et aussi pour la production agricole

Le nerprun bourdaine peut aussi s’installer dans les boisés en milieu agricole et engendrer une perte de rendement. En effet, cette plante est hôte du puceron du soya, un indésirable de cette culture.

La situation du nerprun bourdaine sur le territoire

A l’heure actuelle, nous avons connaissance d’un seul lieu où la présence du nerprun bourdaine est avérée, dans la municipalité de Saint-Sylvestre (MRC de Lotbinière).

Sa présence a également été signalée tout proche, aux limites du bassin versant de la rivière Chaudière, soit dans la municipalité de Saint-Damien-de-Buckland (MRC des Appalaches), ainsi qu’aux portes de la MRC du Granit (Coaticook).

Comment s’en débarrasser?

Il n’existe à ce jour pas de méthode d’éradication qui permette d’affirmer que l’on peut se débarrasser définitivement d’une colonie de nerprun.

Toute action portée sur le nerprun bourdaine doit préférablement faire l’objet d’un suivi serré et les efforts d’éradication maintenus sur plusieurs années. En effet, sachant qu’un plant coupé peut produire des rejets de souche (autrement dit, se multiplier en faisant pousser plusieurs tiges simultanément à l’endroit ou le précédent arbuste a été coupé), la situation peut rapidement devenir incontrôlable.

  • Rejet de souche après une coupe.

    Plusieurs dizaines de tiges de rejets de souche après la coupe d'un plant mature.

Plantes exotiques envahissantes : suivre, contrôler, éradiquer

Si la zone de gestion est effectivement exempte de nerprun bourdaine, faisons en sorte que cette situation perdure! En effet, dans la lutte aux espèces exotiques envahissantes, il vaut mieux prendre les devants de son ennemi et lui couper l’herbe sous le pied avant que ce dernier n’attaque! Autrement dit, il est préférable pour tous de s’informer (et se former) de manière à pouvoir reconnaître les espèces exotiques envahissantes comme le nerprun bourdaine et signaler leur présence aux plus proches autorités. 

Quoi faire en cas de présence de nerprun bourdaine?

Généralement, il faut rapporter votre observation à la municipalité. Celle-ci pourra ensuite en informer les organismes compétents.